
Il y a des années fastes, où les films de qualité semblent prendre l’affiche les uns après les autres, et 2023 est définitivement l’une de ces années. Peu importe le genre que vous appréciez, dans les douze derniers mois nous avons eu de très bons drames (comme L’ÉTABLI réalisé par Mathias Gokalp), des comédies efficaces (entre autres, RYE LANE de Raine Allen-Miller), de la sci-fi spectaculaire (pensons à THE CREATOR de Gareth Edwards) et des documentaires impliquants (assurément SUR L’ADAMANT réalisé par Nicolas Philibert).
Avec plus de 650 longs métrages visionnés cette année (mon record personnel, sûrement à cause de ma première participation comme membre votant international aux Golden Globes), j’ai jonglé très longtemps avec plusieurs titres avant d’en arriver à une version finale de ce top 30. Tellement d’œuvres originales auraient méritées leur place, comme LOS DELINCUENTES réalisé par Rodrigo Moreno, DO NOT EXCEPT TOO MUCH FROM THE END OF THE WORLD de Radu Jude, TOTEM réalisé par Lila Avilés, LES HERBES SÈCHES de Nuri Bilge Ceylan, THE HOLDOVERS d’Alexander Payne, PATHAAN de Siddharth Anand, LE PROCÈS GOLDMAN réalisé par Cédric Kahn, RIEN À PERDRE de Delphine Deloget, BARBIE réalisé par Greta Gerwig, ANSELM de Wim Wenders, ALL OF US STRANGERS de Andrew Haigh et plusieurs autres.

Plus le temps passe, plus je me rends compte qu’un certain type de longs métrages ne correspond plus au cinéma que je supporte et que je désire. Je parle de ces films portés par des cinéastes établis, qui maîtrisent leur médium, mais dont leurs propos me laissent de glace. Il y en a eu quelques uns importants depuis juillet: NAPOLEON de Ridley Scott, OPPENHEIMER réalisé par Christopher Nolan, et aussi KILLERS OF THE FLOWER MOON de Martin Scorsese. Oui, ils sont bien faits, mais en regardant de plus près, certains aspects semblent problématiques, surtout les personnages féminins qui se réduisent à supporter (encore) les premiers rôles masculins. En 2023, disons que je m’attendais à plus de nuances.
Parmi mes déceptions de l’année, il y a en tête de liste ASTEROID CITY de Wes Anderson (qui s’est repris avec ses quatre courts métrages sur Netflix), épuisant notre regard encore une fois avec son style devenu prévisible. Également AFIRE de Christian Petzold, dont je m’attendais à beaucoup plus. DREAM SCENARIO de Kristoffer Borgli, qui prouve qu’avoir une bonne idée n’est pas suffisant, il faut savoir quoi en faire. J’ajoute aussi le populaire SPIDER-MAN: ACROSS THE SPIDER-VERSE du trio composé de Joaquim Dos Santos, Justin K. Thompson et Kemp Powers, dont l’abus d’araignées peut causer une arachnophobie cinématographique. Et LES JOURS HEUREUX de Chloé Robichaud, où la musique occupe trop peu de place dans la vie de la protagoniste (comment avoir la tête disponible avec autant de problèmes personnels), en plus d’avoir sous-utilisé l’Orchestre Métropolitain pour élever le récit.

Heureusement, les pépites remplient d’humanité existent encore. Me viennent en tête SCRAPPER réalisé par la britannique Charlotte Regan, FREMONT mise en scène par l’iranien Babak Jalali, et SHOWING UP de l’américaine Kelly Reichardt. Trois scénaristes/réalisateur.trices qui mettent autant de cœur que d’intelligence dans leur récit. Des histoires dans lesquelles nous pouvons nous reconnaître et nous identifier, même si ces personnages semblent très éloignés de nous.
2023 a aussi été marqué par la grève des scénaristes et des comédien.ne.s à Hollywood. Pour le moment, l’intelligence artificielle ne prendra pas le contrôle de l’industrie, ce qui est en soi une bonne nouvelle. Autre constat réjouissant, l’essoufflement des interminables aventures des superhéros, autant du côté de Marvel que de DC Comics. Vivement les héros du quotidien!

Nous nous souviendrons aussi de la multitude de bons films québécois, semaine après semaine sur nos écrans. La pandémie aura été difficile, autant pour le retour en salle que pour les tournages, mais en 2023 le public a grandement encouragé et soutenu la production nationale. C’est certain que dans un top 30 international, tous les pays se bousculent pour les quelques places disponibles. Cette année, deux œuvres signées par des cinéastes du Québec ont pu s’y classer (je vous laisse les découvrir un peu plus bas), un de plus que l’an passé. Soulignons aussi les très bons GEOGRAPHIE OF SOLITUDE de Jacquelyn Mills, VAMPIRE HUMANISTE CHERCHE SUICIDAIRE CONSENTANT réalisé par Ariane Louis-Seize, BUNGALOW mis en scène par Lawrence Côté-Collins, RESPIRE d’Onur Karaman, MADEMOISELLE KENOSPIA de Denis Côté, SUCRÉ SEIZE d’Alexa-Jeanne Dubé, LE PLONGEUR de Francis Leclerc, DESVIO DE NOCHE de Paul Chotel et Ariane Falardeau St-Amour, TU NE SERAS JAMAIS de Robin Aubert, IRLANDE CAHIER BLEU d’Olivier Godin, LES RAYONS GAMMA réalisé par Henry Bernadet et KANAVAL d’Henri Pardo.

Nous en arrivons aux films de mon top 30, une liste plus que jamais éclectique, montrant que j’aime tous les genres cinématographiques. Plus d’une quinzaine de pays représentés, vraiment peu de longs métrages américains, presque la parité, confirmant que le cinéma au féminin gagne en force et en assurance, défrichant des territoires narratifs qui méritent d’être explorés. Et l’œuvre qui trône au sommet, un premier film très maîtrisé, d’une grande intelligence émotionnelle, d’une jeune cinéaste pleine de promesses, tout juste devant une puissante Palme d’Or.
- PAST LIVES de Celine Song
- ANATOMIE D’UNE CHUTE de Justine Triet
- LES FEUILLES MORTES d’Aki Kaurismäki
- PACIFICTION d’Albert Serra
- POOR THINGS de Yorgos Lanthimos
- LE BLEU DU CAFTAN de Maryam Touzani
- THE ZONE OF INTEREST de Jonathan Glazer
- LES CHAMBRES ROUGES de Pascal Plante
- R.M.N. de Cristian Mungiu
- SCRAPPER de Charlotte Regan
- JE VERRAI TOUJOURS VOS VISAGES de Jeanne Herry
- FREMONT de Babak Jalali
- PERFECT DAYS de Wim Wenders
- IL SOL DELL’AVVENIRE de Nanni Moretti
- RETOUR À SÉOUL de Davy Chou
- TRENQUE LAUQUEN de Laura Citarella
- REVOIR PARIS d’Alice Winocour
- ENYS MEN de Mark Jenkin
- MONSTER de Hirokazu Kore-eda
- GODZILLA MINUS ONE de Takashi Yamazaki
- SUR LES CHEMINS NOIRS de Denis Imbert
- LA PASSION DE DODDIN BOUFFANT de Tran Anh Hung
- ORIGIN d’Ava DuVernay
- RICHELIEU de Pier-Philippe Chevigny
- I LIKE MOVIES de Chandler Levack
- SHOWING UP de Kelly Reichardt
- IO CAPITANO de Matteo Garrone
- FOUDRE de Carmen Jaquier
- LA CHIMERA d’Alice Rohrwacher
- LE VOURDALAK d’Adrien Beau