2025 – Mes 30 meilleurs films

Un peu comme un nostalgique, je reviens sur mes douze derniers mois de visionnement en fouillant dans mes souvenirs, pour tenter de trouver les œuvres qui m’habitent encore, même des mois après les avoir vues. De plus en plus, je cherche des longs métrages qui font du sens avec notre époque, qui en sont l’écho et parfois le miroir. Je ne cracherais jamais sur un bon divertissement, mais lorsque je rejoins des gens dans une salle obscure, j’aime l’idée que cette communauté spontanée puisse vivre quelque chose de profondément humain, qui nous transporte et nous transforme un peu avant que le générique apparaisse.

2025 aura très mal commencé, avec le décès d’un des plus grands cinéastes, un de mes favoris, David Lynch. Ce n’est pas une surprise que le réalisateur de BLUE VELVET trône au sommet des metteurs en scène dont j’ai vu le plus de films cette année (en égalité avec une belle découverte, Jem Cohen, un américain d’origine afghane basé à New York). Parti en même temps que les ravageurs feux de forêts en Californie, Lynch était libre, nous proposant un univers si singulier, si fascinant, si impénétrable. Il nous manquera énormément, mais heureusement nous pourrons replonger à volonté dans ses rêves et cauchemars éveillés.

Une année record pour moi, j’ai vu plus de 735 longs métrages, et sensiblement le même nombre dans le format court. C’est énormément d’images et de sons, mon cerveau faisant un tri sélectif pour faire place à de nombreux autres qui m’attendent en 2026. Ce que je retiendrai le plus du cinéma en 2025, c’est la grande quantité d’excellentes interprétations, autant masculines que féminines. De Jennifer Lawrence dans DIE MY LOVE (Lynne Ramsay) à Leonie Benesch dans LATE SHIFT (Petra Volpe), de Sergi López dans SIRÂT (Oliver Laxe) à Gael García Bernal dans MAGELLAN (Lav Diaz), les actrices et les acteurs étaient plus que jamais la matière première des films les plus marquants de cette année. Vais-je me remettre un jour des multiples expressions sur le visage de Jessie Buckley dans les derniers moments d’HAMNET (Chloé Zhao)?

Quelques mots sur le cinéma québécois, qui encore une fois, parvient malgré vents et marées, à se faire remarquer sur la scène internationale, et qui continue de séduire un public de plus en plus fragmenté. Un seul film de chez-nous se retrouve dans mon top 30 (je vous laisse le découvrir), mais j’aimerais souligner d’autres coups de cœur des derniers mois. DES CHATS SAUVAGES de Steve Patry et PARMI LES MONTAGNES ET LES RUISSEAUX de Jean-François Lesage, deux documentaires qui m’ont profondément touchés, les meilleurs de la carrière de ces précieux capteurs de réel. En documentaire, il y a eu aussi BAIE JAMES 1975: LE CHOC DES NATIONS du trio composé de Melanie Lameboy, Myriam Berthelet et Mathieu Fournier, SEPT-ÎLES ’72: ARCHIVES DU MONDE ORDINAIRE d’Étienne Langlois et ARCHÉOLOGIE DE LA LUMIÈRE de Sylvain Lespérance. En fiction, plusieurs réalisatrices se sont démarquées, dont Anne Émond avec AMOUR APOCALYPSE, Chloé Robichaud qui nous proposait DEUX FEMMES EN OR, et les premiers longs métrages de fiction de Marie Brassard (LE TRAIN), Chloé Cinq-Mars (PEAU À PEAU) et Junna Chif (INVISIBLES). Du côté masculin, la première fiction d’Hubert Caron-Guay, LA MÉCANIQUE DES FRONTIÈRES est celui qui m’a le plus bouleversé.

Allons-y avec les trente longs métrages qui m’ont le plus marqué, m’ayant laissé de leur lumière entre mes deux oreilles (à noter que je ne tiens pas compte des sorties en salle, mais bien du moment où j’ai vu pour la première fois un film. Donc, UNE LANGUE UNIVERSELLE réalisé par Matthew Rankin se retrouve dans mon top 2024, et plusieurs autres aussi):

30. PILLION, Harry Lighton, Angleterre

Une des belles surprises de l’année, une comédie noire qui laisse surgir un peu de tendresse, porté par un duo d’acteurs (Harry Melling et Alexander Skarsgård) que tout oppose, et qui pourtant forme un couple crédible dans leur dynamique relationnelle. Pour un premier long métrage, Harry Lighton nous promet de bien belles choses dans le futur.

29. ONE BATTLE AFTER ANOTHER, Paul Thomas Anderson, États-Unis

C’est assurément l’un des meilleurs divertissement de l’année, mené par un casting exemplaire. Mais peut-être que j’espérais un peu plus de mordant sur l’aspect politique, qui demeure en surface. Paul Thomas Anderson semble avoir beaucoup de plaisir derrière sa caméra, et c’est vraiment contagieux pour nous les spectateurs.

28. LA PETITE DERNIÈRE, Hafsia Herzi, France

Le récit initiatique le plus bouleversant de 2025, LA PETITE DERNIÈRE confirme l’importance que prend tranquillement la cinéaste Hafsia Herzi dans le paysage cinématographique français. Une voix forte, mais qui privilégie l’intelligence, la patience et la douceur. Et que dire de Nadia Melliti, un premier rôle immense, qui méritait amplement son prix d’interprétation au Festival de Cannes en mai dernier.

27. APRIL, Dea Kulumbegashvili, Georgie

Dea Kulumbegashvili est un nom à retenir. APRIL est une claque qui s’immisce en nous pour ne plus nous quitter. Après seulement deux longs métrages (le précédent étant BEGGINING sorti en 2020), la réalisatrice géorgienne est capable de jongler avec le réalisme des frères Dardenne et l’abstraction de David Lynch. Aussi bien dire qu’elle fait le grand écart.

26. PARTIR UN JOUR, Amélie Bonnin, France

Je n’aime pas les comédies musicales, probablement parce que tout me semble artificiel, trop coincé dans l’idée d’intégrer des moments musicaux. Mais parfois, certaines me séduisent par leur décomplexion, le désir de ne pas respecter ce genre à la lettre. Et c’est exactement le cas pour PARTIR UN JOUR, la cinéaste Amélie Bonnin qui a adapté son court métrage du même titre, avec le même duo attachant, composé de Juliette Armanet et Bastien Bouillon. Sans rien réinventer, le charme opère à merveille.

25. O AGENTE SECRETO, Kleber Mendonça Filho, Brésil

Kleber Mendonça Filho est un grand conteur, tant par ses dialogues que par sa réalisation qui rehausse son récit. On se laisse porter par l’intrigue lente et suave de O AGENTE SECRETO, et l’interprétation toute en finesse de Wagner Moura. Et c’est fascinant que le cinéaste brésilien continue d’explorer sa ville, Recife, à travers toutes ses histoires.

24. VALEUR SENTIMENTALE, Joachim Trier, Norvège

Même si VALEUR SENTIMENTALE m’a laissé de glace, je reconnais tout le talent de Joachim Trier pour diriger ses actrices et acteurs, et pour faire de cette maison un personnage en soi. Renate Reinsve et Inga Ibsdotter Lilleaas forment un des plus crédibles duo de sœurs du grand écran, et elles mériteront toutes les statuettes qu’elles obtiendront.

23. RESURRECTION, Bi Gan, Chine

Il y a dans RESURRECTION tellement de moments de grâce, prouvant que Bi Gan est l’un des plus grands amoureux du septième art. Le cinéaste chinois fait de la magie avec sa caméra, nous surprenant souvent, nous égarant parfois, mais jamais il ne nous ennuie. Je crois que nous découvrirons son plein potentiel dans les années à venir.

22. THE MASTERMIND, Kelly Reichardt, États-Unis

L’Amérique à travers le regard de Kelly Reichardt est très révélateur sur une partie de ses compatriotes, celles et ceux qui n’entrent pas dans le moule de la « société active ». Même si l’action de THE MASTERMIND se déroule durant la Guerre du Vietnam, son film en dit beaucoup sur les États-Unis d’aujourd’hui. Un anti thriller policier, la réalisatrice déconstruit le genre pour nous amener dans une dérive existentielle, nous questionnant sur nos propres charges mentales contemporaines.

21. LA MORT N’EXISTE PAS, Félix Dufour-Laperrière, Québec

Troisième long métrage animé du talentueux Félix Dufour-Laperrière, LA MORT N’EXISTE PAS impressionne tant dans sa forme que dans son propos. Un œuvre politique forte, où le cinéaste québécois semble préparer ses troupes pour une révolution à venir. Et que dire de ses images sublimes, utilisant les couleurs, mais n’ayant pas peur du monochrome.

20. SONG SUNG BLUE, Craig Brewer, États-Unis

Un couple qui revisite les chansons de Neil Diamond c’est immiscé dans mon top 20, à ma plus grande surprise. Un scénario bien écrit, des interprètes qui se donnent totalement (Kate Hudson et Hugh Jackman, au sommet de leur art) et une réalisation subtile, font de SONG SUNG BLUE un est plus intimes drames de 2025.

19. TRAIN DREAMS, Clint Bentley, États-Unis

Savoir filmer la nature, la comprendre et transmettre ce qu’elle a de puissant, de nourricier, mais aussi de dévastateur. Le réalisateur Clint Bentley réussit tout ça avec son somptueux TRAIN DREAMS, une tragédie au cœur des forêts. Joel Edgerton trouve enfin un rôle à la mesure de son immense talent, nous offrant le personnage le plus résilient de l’année.

18. SIRAT, Oliver Laxe, Espagne

Travail de mise en scène de dingue, indéniable savoir-faire dans le rendu de l’emballage sonore et visuel, Sergi Lopez dans son plus grand rôle, SIRAT désarçonne, nous secoue, nous rentre littéralement dedans. Mais me connaissant, le nouveau film d’Oliver Laxe aurait du se retrouver plus haut dans ce classement. Plusieurs réserves au niveau du scénario très manipulateur, sans être manichéen, qui surligne un peu trop le propos. Mais du grand art cinématographique!

17. SOVEREIGN, Christian Swegal, États-Unis

Si j’avais à sélectionner un seul film pour décrire les États-Unis en 2025, c’est SOVEREIGN pour lequel je voterais. Premier long métrage parfaitement maîtrisé, Nick Offerman est, une fois de plus, exemplaire dans le rôle de ce père « libre » qui endoctrine son fils, joué par le jeune Jacob Tremblay, parfait lui aussi.

16. NO OTHER CHOICE, Park Chan-wook, Corée du Sud

Park Chan-wook n’est pas un écrivain, ni un peintre. Il est un des grands cinéastes de la planète, et sa virtuosité de son art transparaît dans chacun de ses plans. Regarder NO OTHER CHOICE, c’est assister au déploiement d’une symphonie parfaitement orchestrée, où il n’y a aucune fausse note. Un peu plus d’émotions en aurait fait un très grand film.

15. THE THINGS YOU KILL, Alireza Khatami, Canada

Rares sont les années où la sélection canadienne pour l’Oscar du Meilleur film international n’est pas un drame québécois. THE THINGS YOU KILL n’a pas volé sa place, proposant un scénario déstabilisant qui méritera un deuxième visionnement. Fascinant jeux de miroirs, je suivrai de près les prochains films du cinéaste irano-canadien Alireza Khatami.

14. MIRRORS NO. 3, Christian Petzold, Allemagne

Une histoire simple, aux retournements assez prévisibles, MIRRORS NO. 3 séduit malgré tout par la facilité que Christian Petzold a de construire des scènes déterminantes, sur lesquelles se déclinent sa trame narrative. Paula Beer, devenue la complice du réalisateur allemand, a ce don de porter en elle un mystère qu’elle seule détient la clé.

13. BUGONIA, Yorgos Lanthimos, États-Unis

BUGONIA est assurément le film le plus politique du cinéaste d’origine grec depuis CANINE. Mais comme la majorité des délires cinématographiques de Yorgos Lanthimos, ce sont les jeux de pouvoir entre les personnages qui mènent l’action. Emma Stone et Jesse Plemons sont encore une fois chez Lanthimos, rien de moins que grandioses.

12. A POET, Simón Mesa Soto, Colombie

Impossible de ne pas s’attacher au personnage d’Oscar, poète tourmenté et sans emploi, qui voit le destin lui offrir une nouvelle chance. Cette comédie noire du réalisateur colombien Simón Mesa Soto m’a fait rire aux éclats plusieurs fois, et Ubeimar Rios est très touchant dans son premier rôle.

11. COVER UP, Laura Poitras et Mark Obenhaus, États-Unis

Comment faire un grand documentaire sur l’un des plus importants journalistes des soixante dernières années? En étant excessivement bien préparé, en ayant quelques cartes bien dissimulées dans ses manches, et les sortir au moment approprié. Tel est le tour-de-force de Laura Poitras et Mark Obenhaus, qui ont réussit à rendre justice au talent de Seymour Hersh, tout en jouant le même jeu avec lui.

10. NOUVELLE VAGUE, Richard Linklater, France/États-Unis

Lorsque l’on est passionné de cinéma, un film comme NOUVELLE VAGUE est un cadeau généreux pour lequel on aimerait remercier personnellement le réalisateur. Merci Richard Linklater pour ce voyage dans le temps qui invente une réalité fictive nous montrant les tics et le génie de Jean-Luc Godard. Et chapeau à Guillaume Marbeck, crédible et génial dans le rôle du cinéaste d’origine suisse.

9. SOUND OF FALLING, Mascha Schilinski, Allemagne

La temporalité au cinéma est un aspect qui me fascine. Lorsqu’une cinéaste réussit à entremêler quatre points de vue différents, sur un période de cent ans au sein d’un même lieu, je me lève et j’applaudis. C’est ce que Mascha Schilinski a admirablement fait avec SOUND OF FALLING, nous offrant une leçon de montage avec sa courte-pointe cinématographique.

8. SORRY, BABY, Eva Victor, États-Unis

Adresser un événement traumatique, avec humour et intelligence, tel est l’exploit de l’actrice, scénariste et réalisatrice américaine Eva Victor, avec son premier long métrage SORRY, BABY. Avec délicatesse et maladresse, son film semble à son image, ne tentant pas d’être autre chose. Mon coup de cœur d’authenticité de l’année, j’ai vraiment hâte de suivre cette artiste qui possède déjà une signature unique.

7. IS THIS THING ON?, Bradley Cooper, États-Unis

Il est plein de surprise ce Bradley Cooper. Bien loin de ses précédents MAESTRO et A STAR IS BORN, le comédien et réalisateur nous propose une histoire de divorce, teintée d’humour. Will Arnett y trouve le rôle de sa vie, avec ce père un peu perdu qui se retrouvera grâce à ses performances de stand up. Plus de Will Arnett sur scène s’il vous plaît!

6. À BICYCLETTE!, Mathias Mlekuz, France

Le cinéma peut aider à traverser les pires épreuves de la vie. À BICYCLETTE! en est la preuve. Après le suicide de son fils, le réalisateur et comédien Mathias Mlekuz a refait le périple à vélo de son garçon, avec l’aide de son ami, l’acteur Philippe Rebbot. Cette fiction m’a profondément émue, avec ses deux hommes vulnérables qui se lancent un défi trop exigeant pour eux.

5. TATAMI, Zar Amir Ebrahimi et Guy Nattiv, Angleterre/États-Unis

Quand la politique et le sport se mélangent, ça peut devenir explosif. Et c’est littéralement ce que TATAMI raconte, avec intensité et précision. Choix judicieux du noir et blanc, la comédienne Zar Amir Ebrahimi coréalise avec Guy Nattiv le drame le plus enlevant de l’année. Et Arienne Mandi est une révélation dans le rôle principal.

4. LATE SHIFT, Petra Volpe, Suisse/Allemagne

Déjà épatante l’an dernier dans THE TEACHER’S LOUNGE, l’actrice allemande Leonie Benesch est encore une fois immense sous la gouverne de la réalisatrice Petra Volpe dans LATE SHIFT. Un drame qui déborde d’humanité, nous montrant la dure réalité d’une infirmière de nuit. Le genre d’œuvre dont nous en sortons grandi, et reconnaissant.

3. HAMNET, Chloé Zhao, États-Unis

Bonjour les Oscars! Est-ce que c’est possible de remettre tout de suite la statuette dorée à Jessie Buckley? L’actrice irlandaise y est magistrale dans ce nouveau drame de Chloé Zhao, tout comme son partenaire de jeu, Paul Mescal. À vrai dire, tous les aspects de cette production sont grandioses. Et Chloé Zhao confirme qu’elle fait partie des grandes.

2. UN SIMPLE ACCIDENT, Jafar Panahi, Iran/France

Le film courageux de 2025, une palme d’Or amplement méritée, UN SIMPLE ACCIDENT signe le triomphe de Jafar Panahi. L’expression « tourner à tout prix » prend tout son sens avec lui et toute son équipe, ne les oublions pas. Un grand film sur le doute, sur la justice et l’injustice, d’un homme qui se bat pour la liberté d’expression de son pays.

1. TARDES DE SOLEDAD, Albert Serra, Espagne

La leçon de cinéma de cette année, c’est Albert Serra qui nous l’a donnée avec son exemplaire documentaire TARDES DE SOLEDAD. L’enchaînement des plans serrés sur le matador péruvien Andrés Roca Rey nous garde captif, sans pourtant nous étouffer. À vrai dire, le cinéaste nous garde fasciné et quasiment hypnotisé par le spectacle macabre qui se joue devant nos yeux. Tant au niveau visuel que sonore, Albert Serra critique subtilement et avec doigté, cette discipline complètement désuète. Une œuvre immense!

Laisser un commentaire