ET DIEU…CRÉA LA FEMME, le chemin parcouru

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Il y a des œuvres cinématographiques dont les effets qu’ils ont provoqués transcendent leurs images et l’histoire qu’elles racontent. C’est le cas d’ET DIEU…CRÉA LA FEMME de Roger Vadim, mettant en vedette Brigitte Bardot, jugé alors comme un film sulfureux aux mœurs légères. Sensuelle et épris de liberté, Bardot joue une jeune femme orpheline, Juliette, qui rêve simplement de profiter de la vie et d’être heureuse. En 1956, ce premier long métrage de Vadim lancera le mythe de sa femme aux initiales célèbres, B.B., tout en pressentant la libération sexuelle à venir qui sera confirmé environ 10 ans plus tard en France par la légalisation de la pilule.

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Si ET DIEU…CRÉA LA FEMME dans son ensemble demeure assez classique, la seule présence de Brigitte Bardot offre une lumière et une fraîcheur rarement vu alors au cinéma. Et le ton est donné dès la première séquence où nous voyons le riche homme d’affaires Monsieur Carradine (l’acteur autrichien Curd Jürgens) traverser des rangées de vêtements séchant au soleil et trouver Juliette étendue nue derrière un drap blanc. Ce serpent qui l’a scrute derrière cette fausse virginité lui dira « j’ai apporté la pomme » et elle de rétorquer « quelle pomme? » pour qu’il lui réponde finalement « la tentation ». Avec cette libre interprétation du péché originel, Roger Vadim met la table pour ce brûlant festin pour les yeux qui fera scandale à l’époque.

Ils seront trois hommes à la désirer et la vouloir comme femme : Carradine, Antoine (Don Juan fougueux, aîné de trois garçons et interprété par Christian Marquand) et son frère Michel (sentimental, sensible et campé par un très jeune Jean-Louis Trintignant). Aucun des mâles de ce « carré amoureux » ne réussira à comprendre les aspirations  de Juliette, chacun tentant maladroitement de la dompter. Dans la société patriarcale française, cette femme non-conventionnelle et libre ira rejoindre toute une jeunesse qui rêve de s’affranchir des codes sociaux d’après-guerre.

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Autre séquence clé du film lorsque Juliette quitte Antoine sur le quai, dont elle a entendu ses plans la concernant, pour aller rejoindre Monsieur Carradine sur son bateau. Elle s’invite et se confronte à un monde qui n’est pas le sien, celui du pouvoir et de l’argent. Lorsqu’elle refuse les avances d’un puissant nanti, le bien nommé Monsieur Le Franc, elle reçoit par accident (vraiment?) son dard sur sa main trop près de la cible. Jamais l’expression « qui s’y frotte s’y pique » n’a aussi bien été illustrée et démontre les risques de sa trop grande liberté. Carradine tentera de profiter de l’occasion pour se rapprocher d’elle mais Juliette lui demande alors si Antoine l’attend toujours sur le quai. Elle part le rejoindre et Carradine répliquera la phrase la plus significative du film à l’une de ses invités à bord concernant le départ précipité de la jeune femme « parce qu’elle a le courage de faire ce qui lui plaît quand ça lui plaît». Si tout est dit sur la nature du personnage de Juliette, le film viendra ralentir ses ambitions, comme s’il fallait assurément faire payer ce désir trop grand de vouloir s’affranchir des conventions établies.

Et n’oublions pas la célèbre danse « tam-tam mambo » durant laquelle Brigitte Bardot met tout son charme dans ses mouvements frénétiques et dans son regard troublant voulant fuir vers une île déserte.

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Il faut voir ou revoir ET DIEU…CRÉA LA FEMME pour comprendre tout le chemin parcouru depuis et pour ainsi mesurer l’audace et, d’une certaine façon, le courage du couple Vadim-Bardot. Le succès international du film et de son interprète principale leurs donneront raison. Si la réception des critiques fut mitigée, c’est à un certain François Truffaut (alors critique aux Cahiers du cinéma) que je laisserai le mot de la fin car il sut cerner l’importance de ce que véhiculait cette œuvre marquante : « film sensible et intelligent ; c’est un film typique de notre génération, car il est amoral (refusant la morale courante) et puritain (conscient de cette immoralité et s’en inquiétant) ».

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