Avant le générique de fin des 22e RIDM

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L’hallucinant MIDNIGHT FAMILY de Luke Lorentzen

En plongeant tête première dans la programmation des RIDM 2019, force est de constater que le documentaire n’a vraiment rien à envier à la fiction. Nous pourrions même affirmer qu’il y a beaucoup plus d’audace, de prises de risque et d’explorations narratives dans ces métissages de la réalité. Comme je le mentionnais au début du festival, il y a une multiplicité des réels et comme spectateur, nous sommes de plus en plus impliqués dans la réception de ces œuvres, nous laissant de la place pour réfléchir à ce qui nous est proposé, à en imaginer la suite et à questionner ces mises en scène d’une matière première dans laquelle nous baignons tous.

À la mi-parcours de cette 22e édition, retour sur tous les films vus (en plus des autres visionnés précédemment):

ADOLESCENTES de Sébastien Lifshitz, France ⭐⭐⭐

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Avec une proximité surprenante, Sébastien Lifshitz a suivi pendant 5 ans Anaïs & Emma, deux amies aux allures bien différentes qui se complètent à merveille. Il est toujours impressionnant de constater à quel point les protagonistes oublient assez rapidement la caméra qui les observe, permettant au cinéaste de capter des moments précieux, où l’authenticité devient la plus séduisante des qualités. Malgré quelques longueurs, ADOLESCENTES brosse un portrait juste et pertinent de ces jeunes femmes qui découvrent les violences du monde adulte (les attentats en sol français).

 

ANATOMIE D’UN RAPPORT de Luc Moullet & Antonietta Pizzorno, France ⭐⭐⭐1/2

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En attendant impatiemment la leçon de cinéma qui lui est consacrée, plusieurs films de Luc Moullet sont présentés durant le festival. On retiendra entre autres, ANATOMIE D’UN RAPPORT qui semble toujours aussi pertinent, en cette ère du #metoo et de l’importance du consentement. Dans cette docufiction (qu’il a coréalisé avec sa conjointe Antonietta Pizzorno), un couple se confronte et se questionne sur sa sexualité, sur la place des femmes et le rôle des hommes dans la société. Sorti en 1976, ce film a de quoi nourrir bien des discussions, car même si les mœurs ont évolué, le combat pour l’égalité et l’équité n’est toujours pas gagné.

 

ANDREY TARKOVSKY. A CINEMA PRAYER d’Andrey A. Tarkovsky, Russie ⭐⭐⭐1/2

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Revisiter les chefs d’oeuvre d’Andreï Tarkovski, c’est prendre la mesure du talent de cet immense poète des images et du sons, de son importance capitale dans l’histoire du septième art. À travers des archives personnelles et de nouvelles séquences qui reviennent sur les lieux de ses tournages, le fils de Tarkovski confectionne une courte-pointe juste assez nostalgique, dans laquelle son père se confie tendrement sur le rôle crucial qu’a joué son enfance sur son imaginaire cinématographique. Nous découvrons aussi les dessous de l’industrie du cinéma soviétique et les défis imposés au cinéaste de STALKER. Un incontournable pour tous les cinéphiles qui veulent en savoir un peu plus sur celui qui influence encore aujourd’hui bien des réalisateurs.

 

CEMETERY de Carlos Casas, France/Pologne/Royaume-Uni/Ouzbekistan ⭐⭐⭐1/2

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Imaginez devenir un éléphant, le temps d’une projection. CEMETERY de l’artiste visuel et cinéaste Carlos Casas, c’est un peu ça et beaucoup plus. Film immersif, proche de l’installation muséale, le documentariste barcelonais nous oblige à ralentir, à suivre le rythme de ce mammifère qui impose le respect. Il faut s’abandonner dans cette nature luxuriante, ne pas avoir peur de l’obscurité animé de la jungle et faire confiance au cornac dans ce somptueux voyage éthéré, proche des songes d’Apichatpong Weerasethakul.

 

THE HOTTEST AUGUST de Brett Story, Canada/États-Unis ⭐⭐

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L’idée de départ était louable, soit celle de faire une composition protéiforme de New-York en août 2017, à travers les réponses des habitants de la grosse pomme. Mais la documentariste canadienne Brett Story a peut-être surévalué ses intervenants, ne parvenant pas à trouver l’équilibre pour départager le futile du bienséant. Comme son titre l’indique, THE HOTTEST AUGUST ressemble à une belle longue promenade dans les rues de la mégapole américaine sous un soleil ardent, à la recherche d’une fontaine pour se rafraîchir que nous ne réussissons pas à trouver.

 

L’ÎLE AUX OISEAUX de Maya Kosa & Sergio Da Costa, Suisse ⭐⭐⭐1/2

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Oui, la réalité de l’un est définitivement la fiction de l’autre. En suivant le jeune Antonin durant sa formation d’élevage de souris dans ce refuge pour oiseaux, parfois on pourrait se croire dans une comédie des frères Coen, par ce ton décalé où le malaise et le fou rire cohabitent. Pourtant, Maya Kosa & Sergio Da Costa filment bien la réalité dans L’ÎLE DES OISEAUX, mais ils l’ont si bien mis en scène que nous nous détachons complètement de ce réel surréel. Un documentaire fascinant qui détonne, une brise nécessaire dans un marathon de visionnement.

 

LOS REYES de Bettinat Perut & Iván Osnovikoff, Chili/Allemagne ⭐⭐⭐1/2

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Les animaux ont la cote cette année aux RIDM, particulièrement les chiens (voir l’autre docu canin, SPACE DOGS). Dans LOS REYES, nous sommes à la hauteur de Football et Chola, deux attachants chiens errants qui font la paire dans ce vieux parc de Skateboard de Santiago. L’un jappe après tout ce qui bouge sur deux roues ou plus, l’autre a toujours une roche/bouteille/balle dans sa gueule. Bettinat Perut & Iván Osnovikoff réussissent un véritable tour de force, soit celui d’accompagner ce sympathique duo sans jamais les déranger ou influencer leur comportement. Ils vont même jusqu’à explorer en macro leur fourrure, leur museau et leurs pattes, nous montrant ainsi l’usure de la vie sur leur corps vieillissant. Un coup de cœur pour ce buddy-documentaire, preuve que l’amitié animale existe vraiment.

 

MIDNIGHT FAMILY de Luke Lorentzen, Mexique/États-Unis ⭐⭐⭐⭐

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Poursuites d’ambulances dans les rues de Mexico, policiers corrompus qui exigent leurs parts sur chaque transport de victimes, une famille qui vie pratiquement dans ce véhicule d’urgences pas trop récent, voilà un bref aperçu de ce qui vous attend dans le déroutant MIDNIGHT FAMILY. En voyant cette étourdissante plongée urbaine, c’est à se demander où le jeune documentariste américain Luke Lorentzen pouvait-il se placer dans cette ambulance encombrée pour capter à chaud ce réel. Un grand film de cinéma direct qui fait confiance à son sujet pour révéler toutes les failles du système de santé mexicain.

 

THE SEER AND THE UNSEEN de Sara Dosa, Islande/États-Unis ⭐⭐

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En lisant l’intrigant synopsis de THE SEER AND THE UNSEEN, il était tout à fait normal que le film se retrouve au sommet de ma liste des documentaires les plus attendus des RIDM 2019. Mais il y a si peu à se mettre sous la dent dans ce classique combat entre une environnementaliste convaincue (et ses amis elfes) contre l’étalement urbain. Le véritable sujet de Sara Dosa était pourtant droit devant elle, cette Ragga Jónsdóttir qui se dit en contact avec ces créatures invisibles. Personne ne remet en question ses croyances, ce qui est noble de la part de ceux et celles qu’elle croise, mais il y avait sûrement plus à comprendre dans cet attachement que Madame Jónsdóttir leurs porte.

 

STATE FUNERAL de Sergei Loznitsa, Pays-Bas/Lituanie ⭐⭐⭐⭐

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Pour de nombreux occidentaux, l’ex-Union soviétique (et même encore aujourd’hui la Russie) fascine. Pays aux mille visages, dont trop peu se retrouvent devant les caméras pour montrer la multiculturalité de ce vaste territoire, le cinéaste ukrainien Sergei Loznitsa poursuit son colossal travail de recherche en s’intéressant cette fois-ci aux funérailles du dictateur Staline. En 135 minutes, les riches archives souvent inédites qu’il nous propose, nous montre à quel point ces millions de gens adhéraient (ou peut-être cachaient-ils leur opposition?) à ce culte de la personnalité. L’ensemble ressemble à un interminable hommage aux couleurs surannées, duquel il est simplement impossible de détourner le regard.

 

Pour découvrir tous les 154 titres de cette 22e édition des RIDM.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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