Colin Low, le pionnier

 

https://www.youtube.com/watch?v=Hu64xbgprWY

Un géant du cinéma canadien vient de nous quitter à l’âge de 89 ans, le cinéaste Colin Low.

Autant comme réalisateur que comme producteur, il a marqué le 7e art de ce côté-ci de la frontière avec des films comme CORRAL, CITY OF GOLD et l’incroyable UNIVERSE (coréalisé avec son collègue Roman Kroitor).  Ce dernier film aurait eu un très fort impact sur Stanley Kubrick pour son projet 2001: A SPACE ODYSSEY.

Avec plus de 200 films majoritairement à l’Office National du Film, Low a aussi participé à la création de la technologie IMAX.

Un des derniers grands pionniers du cinéma nous quitte. Merci pour le cinéma Monsieur Low!

Suivre Jeff Nichols

mud-sundance-2-LST111117

En voyant le premier ou le deuxième film de jeunes cinéastes, il est possible de savoir que nous attendrons toujours impatiemment leur prochaine réalisation. Pour ma part, se fut le cas en découvrant les Harmony Korine, Denis Côté, Lars von Trier, Leos Carax, Hirokazu Kore-eda, David Michôd, Fatih Akin et tant d’autres.

L’américain Jeff Nichols figure au haut de cette liste. En seulement 3 longs métrages (SHOTGUN STORIES en 2007, le formidable TAKE SHELTER en 2011 et MUD en 2012), ce scénariste de grand talent a réussi à créer de grandes attentes pour tous ses projets à venir. Il sait développer des histoires accrocheuses avec des personnages souvent tourmentés mais rarement agités, hantés par leur passé et craignant souvent l’avenir. De belles métaphores sur l’Amérique contemporaine, teintées d’un esprit et d’un rythme typique des états du sud.

Présentement en compétition officielle au Festival de Berlin, son tout nouveau MIDNIGHT SPECIAL intrigue par son approche fantastique, thème sous-jacent dans son oeuvre la plus puissante et la plus achevée, TAKE SHELTER avec son acteur fétiche Michael Shannon.

Cette cavale père-fils pour protéger le jeune aux pouvoirs surnaturels nous arrivera sous peu, le 18 mars, et elle confirmera sûrement l’étendu du talent de Nichols. Il termine déjà une autre production, LOVING, qui sortira peut-être avant la fin de l’année.

Les images d’Emmanuel Lubezki

Lubezki

En fin de semaine, le directeur-photo d’origine mexicaine Emmanuel Lubezki a marqué l’histoire du cinéma avec ses images pour THE REVENANT d’Alejandro G. Iñárritu. Il est devenu le premier de sa profession à remporter trois années consécutives le prestigieux ASC Awards (le prix remit par l’American Society of Cinematographers, donc par ses pairs) et aussi le seul à l’obtenir pour une 5e fois dans sa carrière (CHILDREN OF MEN d’Alfonso Cuarón en 2006, THE TREE OF LIFE de Terrence Malick en 2011, GRAVITY d’Alfonso Cuarón en 2013, BIRDMAN d’Alejandro G. Iñárritu et maintenant THE REVENANT du même cinéaste).

Il y a aussi de très forte chance qu’il devienne le premier chef opérateur à monter sur la scène du Dolby Theater une troisième fois en trois ans pour soulever le précieux Oscar (toutes catégories confondues, c’est Walt Disney qui détient l’impressionnant record de 8 Oscar consécutifs).

En regardant les projets sur lesquels Lubezki travaille, nous pouvons nous demander jusqu’à quel point il ne devient pas coréalisateur de ceux-ci tellement son influence et sa marque sont identifiables. Impossible de le séparer des plus récents Malick et  Cuarón, et maintenant d’Iñárritu.

En attendant KNIGHT OF CUPS de Terrence Malick qui nous arrivera le 4 mars prochain, ce montage prouve sans l’ombre d’un doute que toutes les images d’Emmanuel Lubezki sont des moments cinématographiques précieux.

AVANT LES RUES, premier film en langue atikamekw

Il semble y avoir un vent de changement qui s’installe tranquillement dans le cinéma québécois. Même s’il reste encore beaucoup de place à faire pour bien représenter la diversité de notre population en fiction, des œuvres récentes comme SCRATCH de Sébastien Godron, LE DEP de Sonia Bonspille Boileau ou encore RHYMES FOR YOUNG GOULS de Jeff Barnaby permettent de croire que le grand écran devient tranquillement un miroir à plusieurs prismes.

C’est pourquoi j’ai très hâte de découvrir AVANT LES RUES de Chloé Leriche, premier film en langue atikamekw, qui concourt présentement à la Berlinale et qui clôturera la 34e édition des Rendez-Vous du Cinéma Québécois.

Voici la bande-annonce:

 

La fille de DHEEPAN

Ce mauvais titre de critique est pleinement assumé, ayant pour seul but de comparer la Palme d’Or de Jacques Audiard, qui nous arrive enfin, avec le Grand prix du jury LE FILS DE SAUL, film exceptionnel du cinéaste hongrois László Nemes. Le coup de poing que nous avons reçu en début d’année, avec cette histoire de Sonderkommando tentant d’enterrer son soi-disant fils, allait-il vraiment être surpassé par le récit de ces trois réfugiés tamouls prétendant être une famille?

12525513_10153984640229203_2276850007495867531_o

Et aussi 9 nominations aux César 2106

Sans être supérieure, la première moitié de DHEEPAN est aussi réussie que celle de LE FILS DE SAUL. Contrairement à ses œuvres précédentes dans lesquels nous étions rapidement impliqués envers ses personnages (UN PROPHÈTE étant le meilleur exemple), Audiard développe habilement la psychologie de chacun d’eux et laisse les liens entre eux se tisser lentement, comme si la plaie de leur exil se refermait au fil du temps.

Lire la suite

Isabelle Huppert chez Mia Hansen-Løve

Après l’excellent EDEN sorti l’an passé, Mia Hansen-Løve est déjà de retour avec L’AVENIR. En compétition cette semaine au Festival de Berlin, ce 5e long métrage de la cinéaste met en vedette Isabelle Huppert.

Découvrez la bande-annonce et deux extraits du film:

Bande-annonce

https://www.youtube.com/watch?v=3R1RVCG8V8E

Extrait #1

Extrait #2

Voir Denis Côté

Denis Côté - Viennale 2013

Denis Côté – Viennale 2013

Avec déjà neuf longs métrages présentés sur nos écrans en seulement onze ans (plus le moyen métrage LES LIGNES ENNEMIES et de nombreux courts métrages), le désir de cinéma chez Denis Côté demeure ce qui anime sa démarche créative. Il y a une véritable envie de provoquer des choses devant sa caméra, de bouleverser les règles établies de la narration, de surprendre le spectateur tout autant que lui-même.

Tenter de classer les œuvres de Denis Côté c’est risquer de poser des mots qui limiteraient la portée de celles-ci. Pour mieux cerner ses intentions et surtout comprendre ce qui lie ses films entre eux, il faut davantage plonger au cœur de ses réalisations. Voir et revoir ses fascinants objets cinématographiques comme la quête d’absolu d’un cinéaste envers son art. Ce besoin de se défier soi-même pour offrir un résultat unique et non conventionnel. C’est comme si cet ancien critique de cinéma s’amusait à nous montrer un univers hors champ, cette marge parallèle qu’il filme avec soin et minutie créant ainsi ses propres frontières imaginaires à l’extérieur de ses plans. Instinctif et obstiné, Côté cause des collisions frontales entre le réel et la fiction, s’intéressant à l’impact du choc et posant sa caméra sur les répercussions de cet étrange amalgame entre le vrai et le faux. L’improbable attaque de trisomiques dans le dépotoir de ferrailles dans CARCASSES le prouve très bien.

5d3a67abed801888f979c35ff3e27404

Scène de l’inclassable CARCASSES

D’un film à l’autre, Denis Côté oscille entre ce besoin d’expérimenter et d’explorer les possibilités du 7e art sans toutefois vouloir sacrifier un souhait de raconter et de mettre en scène des personnages hors normes. C’est pourquoi après CURLING, qui se voulait alors son film le plus accessible, il a volontairement enchaîné avec un essai sans dialogue et mettant en vedette les bêtes d’un zoo, nous donnant ainsi l’étonnant BESTIAIRE. Si les animaux de BESTIAIRE se trouvaient réellement brimés de leur liberté dans leur cage ou leur enclos, dans les cadrages de Côté ils récupéraient, le temps d’un plan ou deux, la possibilité de s’exprimer.

Lire la suite

La moralité chez Denis Villeneuve

Je l’avoue sans hésitation, j’ai toujours eu de la difficulté avec les films québécois de Denis Villeneuve. Mis à part son tout premier long métrage UN 32 AOÛT SUR TERRE (et même un peu avant ça, son formidable court métrage REW-FFWD réalisé à l’ONF), tous ses autres propositions cinématographiques m’ont toujours épaté visuellement mais je sortais des projections troublé par des questions d’ordre moral. Il a atteint des sommets dans l’insupportable POLYTECHNIQUE en 2009, nous plongeant au cœur de ce drame innommable comme si nous étions témoins des actes de barbaries du tueur dont je tairais le nom. Ce point de vue irrespectueux envers la mémoire des victimes m’avait outré et j’avais été soulagé de lire les mots de l’auteur et professeur André Habib dans son désormais célèbre texte MORTES TOUTES LES APRÈS-MIDI.

Si ça ne c’est guerre amélioré avec INCENDIES (pour de toutes autres raisons, mais enchaînons), j’ai retrouvé un vif intérêt dans le travail de Villeneuve depuis qu’il tourne dans la langue de Spielberg. Pourquoi? ENEMY étant davantage un film typiquement canadien-anglais avec ses questionnements schizophréniques (thème déjà très présent dans les films premiers films d’Atom Egoyan & David Cronenberg), je passerai immédiatement à PRISONERS et surtout SICARIO, ses deux longs métrages américains.

8I4A2679.CR2

Denis Villeneuve durant le tournage de SICARIO

Lire la suite

TAXI DRIVER, plus pertinent que jamais

taxi-de-niro-martin-scorsese

Il y a 40 ans sortait en salles le percutant TAXI DRIVER de Martin Scorsese. Bon moment pour revenir sur l’importance de ce film et surtout sa pertinence, encore et peut-être davantage aujourd’hui.

Écrit par le scénariste Paul Schrader (et basé sur un vrai wannabe assassin qui avait fait les manchettes en 1970, Arthur Bremer), c’est le cinéaste Robert Mulligan (TO KILL A MOCKINGBIRD) qui devait au départ réalisé et c’est Jeff Bridges qui allait devenir Travis Bickle. Heureusement pour nous, Schrader a insisté pour que Scorsese se retrouve derrière la caméra et que Robert De Niro prenne les traits du vétéran de la Marine Bickle.

Lire la suite

FATIMA, film précieux

KvCwM

Tranquillement, tel un artisan qui perfectionne son art, le cinéaste Philippe Faucon entre dans la cour des grands avec un film précieux, touchant et nécessaire, FATIMA.

Ayant fait ses classes comme régisseur sur les plateaux de Leos Carax et Jacques Démy, Philippe Faucon a toujours favorisé ces comédiens comme matière première de ses œuvres, tout ça dans des scénarios à hauteur d’hommes et de femmes.

Son 6e long métrage FATIMA, coproduit avec le Québec, est sans l’ombre d’un doute son plus abouti, où il dose habillement ce drame invisible tellement il est commun. Cette ménagère maghrébine monoparentale mère de deux grandes filles de 15 et 18 ans, tente tant bien que mal de leur offrir un avenir plus rose que le sien. Après un accident de travail, elle perfectionnera son apprentissage du français, tout en tenant un journal dans sa langue natale. Pour son scénario finement travaillé, Faucon s’est inspiré de deux livres de Fatima Elayoubi, Prière à la lune (2006) et Enfin, je peux marcher seule (2011). Il aurait pu très facilement tomber dans un insupportable mélodrame où s’enchaînent les clichés. Heureusement, il les évite en misant sur la solide performance de Soria Zeroual, qui mérite amplement sa nomination comme meilleure actrice à la prochaine cérémonie des César, aux côtés de vedettes telles Catherine Frot, Isabelle Huppert et Catherine Deneuve. Ce n’est pas rien.

Lire la suite